Véronique Wautier : Continuo

rien s'endort moi aussi debout
minuscule soleil dans le rien accablant
dans le rire accablant

des géants mangent ma fenêtre
la vie est en ordre
aux joues rouges qu'on embrasse

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Je marche pensées basses mains tristes
et soudain je suis
stupéfaite
par l'arrivée de ces nouvelles fleurs
si violettes elles
ne doutent pas
de leur maison

sont revenues avec une fidélité
dont je fais partie moi aussi ?
 

nous ne sommes faits ni d'herbe ni d'oiseaux
qu'ai-je oublié
pour être si peu couverte
face à la mort ?

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quelques mains endormies
où les mots viennent mourir
rassasiés

les mains des dormeurs s'appellent
elles se connaissent par leur nom

c'est une rivière à la fin de la nuit
changée en vin

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rien on ne sait rien
la nuit s'est couchée dans l'herbe

bienveiller
dans le peu être ensemble
réchauffer l'ignorance
nos fous brûlent fort

j'entends juste le bruit de l'eau
son continuo mais le mythe
c'est un lieu sans couture
je reviendrai demain

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une incroyable chambre tranquille
clouée sur un radeau
où flamboient dans leurs traces
plus haut que nos vies qui passent
lumière et douleur

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certains croient moi pas
je marche sur cette jambe fantôme
un bon appui en poésie
nos poignées de main sont réelles

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en tombant
il faut tourner le dos à la chute
comme écrire un poème irrégulier

ellipse effaçure élancement
les visages repoussent
sur la terre brûlée

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regardant tant de fois le ciel
et quelquefois la mer
choses dont le coeur bat si lentement

c'est avec les mots qu'on revient
fabriquant des tesselles
des fragments des éclats

des allées pour ouvrir
la journée jusqu'au soir

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le poème brûle la douleur
c'est sa loi

et la joie immobile
trésor central de toutes les langues
résiste au feu je crois

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j'entends tellement le silence
la vibration des fleuves du dessous
tout est possible alors
tout est encore sauvé
dans le désordre blanc des premiers paysages

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Véronique Wautier
Continuo, poèmes et Peintures d'Anne Slacik
éditions L'herbe qui tremble
Octobre 2017